L'ancien nom de Haute-Volta était associé à celui désignant trois cours d'eau importants: la Volta noire, la Volta blanche et la Volta rouge, aujourd'hui appelés respectivement Mouhoun, Nakambé et Nazinon. Le Burkina fait partie des pays francophones (voir la carte de l'Afrique francophone).
Tous ces peuples parlent des langues qui leur sont propres, mais elles appartiennent pratiquement toutes à la famille nigéro-congolaise, répartie en trois groupes (ouest-atlantique, mandingue et gur):
On compte quelques langues appartenant à la famille nilo-saharienne (sonrai, zarma) et à la famille chamito-sémitique (haoussa, tamachek). Le français reste la langue officielle, mais il n'est réellement compris que par environ 20 % de la population. Malgré le poids démographique imposant des langues nationales au Burkina, le statut de langue officielle et celui de langue internationale font en sorte que la français pèsent progressivement dans la vie sociale et économique du pays. Cela dit, la langue véhiculaire à Ouagadougou reste le mossi (ou mooré). La mosaïque des langues dans le pays justifie le recours à une langue de communication interethnique. Parmi la cinquantaine de langues parlées, trois langues ont le statut de langues nationales: le mooré (ou mossi), le dioula et le foulfoudé (ou fulbé appelé aussi poular ou peul, selon les régions). Le mooré est la langue la plus répandue. Parlée par 53 % de la population du Burkina, c'est surtout la langue des Mossis et des Gourounsis. Le mooré (ou mossi) est aussi parlé dans les pays voisins tels que le Ghana, la Côte d'Ivoire et le Mali; on peut estimer le nombre de locuteurs du mooré à cinq millions. Le dioula (8,8 %), dérivé du bambara, est la langue du commerce. C'est la langue véhiculaire de l'Afrique de l'Ouest, connue et utilisée historiquement du Sénégal au Nigeria par tous les commerçants; on estime que de trois à quatre millions de personnes peuvent s'exprimer dans cette langue (langue maternelle et langue seconde). Le foulfoudé (6,6 %), appelé aussi poular ou peul, est la langue des Peuls; le nombre de ses locuteurs de tous les pays se situe autour de trois millions. Suivent des langues comme le bissa (3 %), le lobi (2,7 %), le lyélé (2,1 %) et le marka (1,9 %). Parmi ces dernières langues, le peul est parlé par au moins quatre millions de locuteurs dans le reste de l'Afrique. Selon les services de statistique de l'Institut national d’alphabétisation (INA), les langues dans lesquelles les Burkinabés sont alphabétisés sont les suivantes: le sissala, le kasena, le gulmacema, le dioula, le dagara, le lobi, le san, le sonraï, le tamachek, le bwamu, le cara, le zarma, le haoussa, le cerma, le samo, le bobo, le bissa, le nankana, le liyélé, le sikité et le winen.
Issus d’un brassage entre les conquérants et les populations autochtones, mais formant un même ensemble culturel, les quatre royaumes mossi qui furent progressivement constitués ne parvinrent jamais à l’unité politique. Au nord, le royaume du Yatenga fut en contact direct avec les empires soudanais contre lesquels il mena des expéditions (p. ex., la prise de Tombouctou en 1329). Il dut également se défendre des tentatives d’islamisation de l’empire Songhaï. Les autres populations du Burkina eurent leur propre histoire, faite du brassage avec d’autres peuples (Gourmantchés, Bwas, Sénoufo, Gans). Dans le Nord, les Touaregs, les Peuls, les Songhaï et les Djerma se sont établis plus récemment. Le XVe siècle marqua l’arrivée, par l’ouest, de populations de langue mandingue, en particulier des marchands dioula qui seront à l’origine de Bobo-Dioulasso. 3.1 La pénétration française Au XIXe siècle, le pays dut de nouveau faire face aux tentatives des talibés ou disciples d’El-Hadj Omar, des Bambaras de Ségou et des Peuls du Macina. Ces derniers islamisèrent, vers 1810, l’Est voltaïque. En 1895, le Mandingue Samory Touré (vers 1830+1900), un homme de guerre redoutable, tenta de se constituer un État dans la savane. Les Français, qui craignaient d’être pris de vitesse par les Britanniques et les Allemands dans la région, profitèrent des craintes soulevées par cette tentative de conquête chez les souverains locaux pour établir un protectorat sur le royaume mossi de Ouagadougou, en 1896, tandis que les autres royaumes mossi, affaiblis par des querelles dynastiques, étaient également placés sous leur domination. En 1897, les Français s’emparèrent par la force de Ouagadougou, devançant ainsi les Anglais dans la course vers la conquête. Par la suite, les Français ne s’occuperont que fort peu du développement du pays, qui servira surtout de «réservoir de main-d’oeuvre» pour les plantations et le recrutement militaire lors des deux guerres mondiales. C'est à cette époque qu'apparurent les premières écoles (entre entre 1898 et 1903), notamment à Ouagadougou, Gaoua et Tenkodogo. L’implantation de ces «embryons d’écoles» avait été créée à l'intention des militaires qui en assuraient la direction avec l’aide d’interprètes. On enseignait uniquement la langue française. Par la suite, d’autres écoles furent fondées par les missionnaires. De 1904 à 1919, ces nouveaux territoires de l’Empire colonial français furent rattachés à la colonie du Haut-Sénégal-et-Niger, intégrée à l’Afrique occidentale française et englobant l’actuel Soudan et l’actuel Burkina. En 1916, d’importants mouvements de résistance à la conscription se développèrent. Les Mossi constituèrent l’essentiel des bataillons de «tirailleurs sénégalais» qui combattirent aux côtés des troupes alliées durant la Première Guerre mondiale; ils furent appelés ainsi parce qu’ils embarquaient pour le continent européen à Dakar. En 1919, fut créée la colonie de Haute-Volta, avec Ouagadougou pour chef-lieu. En 1932, un an après qu’une grande famine eût ravagé le pays, la Haute-Volta fut démembrée sous la pression des colons européens de la Côte d’Ivoire, du Soudan français (l'actuel Mali) et du Niger. Elle constituait un important réservoir de main-d’œuvre pour les plantations et la construction du chemin de fer Ouagadougou-Abidjan. Le centre et le sud de la Haute-Volta furent annexés à la colonie de la Côte d’Ivoire, le nord intégré au Soudan français et l’est au Niger. Le travail forcé et les impôts, sans oublier la répression à cause des soulèvements, avaient déjà profondément marqué les consciences; beaucoup de citoyens quittèrent la pays pour le Ghana. Pour des raisons d'économies budgétaires, la colonie fut dissoute en 1932. La Haute-Volta, dont beaucoup d’habitants avaient combattu pour la France libre sur les champs de bataille européens de la Seconde Guerre mondiale, retrouva son unité en 1947 lorsque l'administration coloniale reconstitua le pays «dans ses limites de 1932». 3.2 L'indépendance et la Haute-Volta En 1958, la Haute-Volta devint une république autonome au sein de la Communauté franco-africaine, sous la direction de Maurice Yaméogo, chef de l’Union démocratique voltaïque (UDV). En 1959, le pays adhéra au Conseil de l’entente, une organisation qui regroupait les pays francophones de la région: Côte d’Ivoire, Niger, Dahomey (actuel Bénin) et Togo. Le pays accéda à l’indépendance le 5 août 1960 sous le nom de Haute-Volta. Yaméogo, demeuré président de la République, instaura un régime de parti unique, appuyé sur l’Union démocratique voltaïque. Sa gestion du pouvoir fut très controversée et suscita des mouvements de protestation. L’histoire politique de ce pays sera marquée ensuite par de nombreux coups d’État. En janvier 1966, les mesures d’austérité prises par le gouvernement provoquèrent un soulèvement populaire encadré par les syndicats et les partis progressistes. Le président Yaméogo fut contraint de laisser le pouvoir au chef d’état-major, le colonel Sangoulé Lamizana, qui bénéficiait de la confiance de la population. Celui-ci prit la tête du Conseil supérieur des forces armées et élabora un nouveau plan de remise en ordre de l’économie, mais il instaura aussi une politique économique draconienne. En 1970, il promulgua une Constitution instaurant l’élection du président au suffrage universel pour quatre ans et garantissant le multipartisme. Une dizaine de partis politiques participèrent aux élections législatives de 1971. Mais las de gérer les rivalités personnelles, les militaires reprirent le pouvoir en 1974, annonçant le retour au régime de parti unique. Une première grève générale, en décembre 1975, marqua le début des contestations populaires entretenues par les syndicats, jusqu’à la chute du gouvernement militaire en 1977. Une nouvelle Constitution, approuvée par référendum, restaura le multipartisme, limité à trois partis. En 1976, le gouvernement jeta les bases d’une première réforme de l'enseignement dont l'idéologie apparaissait dans un document intitulé Réforme de l’éducation, dossier initial. Cette réforme proposait un enseignement préscolaire pour assurer «l’éveil des enfants», un cycle d’enseignement de base d’une durée de huit ans et un cycle de spécialisation et de recherche. Basée sur l’emploi des langues nationales comme support d’enseignement, la réforme se révéla un échec: elle sera même abrogée par le Conseil national de la révolution, en septembre 1984, pour «non-conformité avec les réalités et les aspirations des populations qui dénonçaient la ruralisation de l’école». En 1978, le général Sangoulé Lamizana fut élu président de la République à l’issue d’une élection pluraliste, mais marquée par une très forte abstention. En 1980, le blocage des salaires et l’augmentation du prix des denrées de base (riz, sucre, sorgho et mil) suscitèrent une nouvelle vague de mécontentement, entraînant un autre coup d’État militaire, qui porta au pouvoir le colonel Saye Zerbo. Bénéficiant d’abord du soutien de la population, il suspendit les institutions et instaura un «Comité militaire de redressement pour le progrès national». Deux ans plus tard, alors que la situation économique s’était dégradée davantage, de jeunes officiers renversèrent Zerbo, à la faveur d’un mouvement de grève. Le nouveau gouvernement militaire était dirigé par le capitaine Thomas Sankara, tandis que le médecin- commandant Jean-Baptiste Ouedraogo s’emparait de la présidence du pays. Difficile la vie d'un Burkinabé! 3.3 De la révolution à la démocratisation En août 1983, l’arrestation du premier ministre Sankara déclencha l’intervention des parachutistes et ouvrit une période d’exaltation révolutionnaire qui allait marquer le pays. Nommé président du Conseil national de la révolution (CNR), après l’éviction de Ouedraogo, Thomas Sankara, que les pays occidentaux accusaient d’être un allié du colonel libyen Kadhafi, mit en place des comités de défense de la révolution, puis s’engagea dans une politique économique nationaliste et progressiste. Des campagnes furent lancées contre la mendicité et la prostitution, pour le sport de masse et le port du «Faso Dan Fani», le costume national.
Les Burkinabés furent de plus en plus exaspérés par par les exécutions sommaires, les «dégagements» des fonctionnaires, les exactions diverses de certains membres des Comités de défense de la Révolution (CDR). Des frictions apparaissent à nouveau au sein du seul parti politique et divisèrent les titulaires du pouvoir. Le 15 octobre 1987, Thomas Sankara fut exécuté — on ignore encore comment il est mort, ni qui l'a tué, ni même où il a été enterré — lors d’un putsch qui porta à la direction du pays le numéro 2 du régime, le capitaine Blaise Compaoré. Ce dernier lança sans tarder sa «campagne de rectification», qui visait, entre autres, à «réajuster» la politique économique du pays et à rétablir la coopération avec la France. En 1988, fut institué le ministère de l’Enseignement de base et de l’Alphabétisation (MEBAM), dont la mission était de mettre en place une éducation de base qui aurait comme objectif de «dispenser à tout Burkinabé un minimum éducatif correspondant aux besoins et aux potentialités du pays et censé former des individus susceptibles de participer, de manière consciente et efficace, à leur propre développement et à celui de la communauté». La poursuite de la crise économique, la pression de la rue et des syndicats comme des organisations financières internationales contribuèrent à imposer la démocratisation dès 1991. Cette année-là, fut signé un premier plan d’ajustement structurel avec la Banque mondiale et le Fonds monétaire international; par référendum, une constitution démocratique fut adoptée. La transition démocratique fut marquée dans sa première année par le boycott de l’élection présidentielle par l’opposition, dont certains membres furent la cible d’attentats. Après l’échec d’un Forum de réconciliation nationale, en février 1992, la vie politique demeura dominée par le parti du président Compaoré. Il fut élu en novembre 1998 avec 87,5 % des suffrages exprimés. En décembre 1998, le décès dans un accident de la route suspect du journaliste de L'Indépendant Norbert Zongo a fait renaître envers le régime une certaine hostilité qui remonte à la mort de Sankara et l'arrivée au pouvoir de Compaoré. Depuis, l'affaire Zongo a dépassé le cadre du Burkina et a considérablement terni la réélection du chef de l'État. Après sa réélection, le président Campaoré a par ailleurs fait modifier la Constitution en 1997 afin de profiter du droit de se représenter à la présidence autant de fois qu'il le souhaite. Il a été accusé de s'impliquer en Sierra Leona et au Liberia pour des affaires de diamants, et de s'ingérer dans la guerre d'Angola et de Côte d'Ivoire. On dit aussi que la destruction de l'avion transportant les présidents hutus du Rwanda et du Burundi, qui déclencha le génocide de 1994, fut planifiée lors d'une réunion au Burkina.
En vertu de l'article 35 de la Constitution du 27 janvier 1997, le français est la langue officielle:
De plus, la loi fixe les modalités de promotion et d'officialisation des langues nationales. Mais il s'agit là d'une «position attentiste» qui n’a guère évolué. Jamais le gouvernement burkinabé n'a fait adopté une quelconque loi destinée à fixer ces «modalités de promotion d'officialisation des langues nationales». Cette disposition constitutionnelle semble seulement un moyen subtil utilisé pour calmer les ardeurs des partisans de l’introduction des langues burkinabées dans le domaine scolaire. Ce paragraphe ne reconnaît pas dans les faits un statut particulier aux langues nationales. Les autorités politiques ont donc laissé les langues nationales à une réalité inférieure et marginale, car le seul cadre où elles ont droit de cité est le milieu familial. 4.1 La langue de l'État Bien qu'officiellement la langue de l'État soit le français, voyons ce qu'il en est dans les faits. En ce qui a trait à la législature, seul le français est admis au Parlement (lorsqu'il n'est pas aboli), et ce, tant dans les débats que dans la rédaction et la promulgation des lois. Bref, c'est la même politique depuis la colonisation française. Pour communiquer avec la population, la plupart des hommes politiques ont encore recours au français et laissent le soin aux «interprètes» de traduire le message dans les langues nationales. Dans les tribunaux, toutes les langues nationales sont permises à l'oral, surtout le mossi (mooré), le dioula, le bissa, le lobi, le peul, le lyélé et le marka. Cependant, dans les documents écrits, seul le français est utilisé. Le juge rend officiellement ses sentences en français, mais le tribunal traduit la sentence à partir du français vers toute autre langue lorsque cela est jugé nécessaire. Il ne s'agit pas d'une politique linguistique orientée vers les langues nationales, c'est simplement une question de force majeure. Dans l'Administration gouvernementale, les fonctionnaires répondent généralement dans la langue locale du citoyen, mais les documents écrits ne sont disponibles qu'en français. Cette pratique est incontournable étant donné que la majorité de la population est analphabète et ignore souvent le français. Le mossi, le dioula et le peul sont beaucoup plus utilisés que les autres langues nationales. Pour contenter à la fois les partisans des langues maternelles et ceux du français, certains avaient proposé de les inclure dans l'administration et d'en tenir compte dans la rédaction des actes administratifs, mais rien n'a été fait. 4.2 Le domaine de l'éducation En vertu de la loi no 013/96/ADP portant loi d'orientation de l'éducation, le français et les langues nationales sont les langues d'enseignement:
Dans les faits, ce n'est pas si simple que cela peut en avoir l'air. La plupart des expériences tentées pour introduire les langues dans l'enseignement ont échoué. On parle d'alphabétisation pour les langues nationales, mais de scolarisation pour le français. C'est pourquoi seul le français est enseigné, tant au primaire qu'au secondaire. Aucune langue étrangère autre que le français n'est vraiment enseignée au primaire dans les écoles publiques. Au secondaire, deux langues sont ajoutées: l'anglais et l'allemand (ou l'arabe pour les musulmans dans les écoles franco-arabes). Seuls 17 % des enfants réussissent à terminer leur secondaire et à peine 1 % des Burkinabés atteignent le niveau universitaire. Le Burkina connaît un taux d’analphabétisme tellement élevé (80 %) qu’il constitue un véritable goulot d’étranglement au point de vue du développement économique. Parmi les pays d’Afrique subsaharienne, le Burkina reste l’un des pays ayant les taux les plus faibles de scolarisation et les plus forts d’analphabétisme. De plus, on note aussi de très grandes disparités géographiques; par exemple, le taux d'alphabétisation est de 11,2 % dans la province de la Gnagna mais 53,2% dans celle du Kadiogo; le taux brut de la scolarisation en 1999-2000 varie de 19,5 % au Sahel à 77,1% au Centre. Par ailleurs, les fille sont nettement sous-représentées avec seulement 40,8 % des élèves des secteurs public et privé en 1999-2000. Précisons enfin que les manuels d'enseignement sont conçus et réalisés sur le modèle d'enseignement en France, avec parfois quelques touches d'«africanismes» pour mériter l'appellation de «manuels adaptés». Le ministère de l'Éducation ne tient que peu compte des difficultés des petits Burkinabés qui, en arrivant à l'école, doivent apprendre à parler une langue, à l'écrire et à la lire en même temps qu'elle leur sert d'instrument pour apprendre d'autres disciplines comme le calcul, les sciences, etc. - L'alphabétisation En ce qui a trait aux langues nationales, il s'agit d'alphabétisation, non de scolarisation. Selon l'Institut national de l'alphabétisation (INA), 24 % des Burkinabés étaient capables en 1994 d'écrire et de s'exprimer dans l'une des 24 langues maternelles faisant l'objet d'un enseignement, mais surtout en mossi (mooré), en dioula et en fulfuldé. Le taux d'alphabétisation est passé à 26 % en 1997, et un plan décennal d'enseignement de ces langues mis sur pied devrait permettre d'augmenter le nombre d'alphabétisés en langue maternelle d'ici 2010. Pourtant, l'introduction des langues africaines dans le dispositif éducatif constitue l’un des facteurs clés de la rénovation du système éducatif. Dans le domaine de l'alphabétisation-formation, les manuels sont disponibles en 22 langues et mis à la disposition des Centres permanents d'alphabétisation et de formation (CPAF) par les «opérateurs en alphabétisation». Rappelons que les langues dans lesquelles les Burkinabés sont alphabétisés sont les suivantes: le sissala, le kasena, le gulmacema, le dioula, le dagara, le lobiri, le san, le sonraï, le tamachek, le bwamu, le cara, le zarma, le haoussa, le cerma, le samogo, le bobo, le bissa, le nankana, le liyélé, le sikité et le winen. Beaucoup se demandent à quoi peut bien servir d’apprendre à lire dans sa langue, s'il est à peu près impossible par la suite de trouver des documents écrits dans cette même langue. Le plus souvent, c’est qu’aucun effort n’est fait pour que des documents adaptés soient disponibles dans les villages. - Les écoles bilingues Il existe aussi des écoles bilingues (français-langues nationales). L'éducation bilingue a été mise au point par le ministère de l’Enseignement de base et de l’Alphabétisation (MEBAM) en 1994 avec l'appui technique et financier de l'Oeuvre suisse d'entraide ouvrière (OSEO). L'école bilingue est une école de cinq ans de cycle scolaire, au lieu de six ans pour l'école classique, et concilie «le savoir, le savoir-faire et le savoir-être» de l'enfant. Dans une école bilingue, la langue maternelle de l'élève est utilisée dès la première année dans une proportion de 90 %, contre 10 % pour le français. Par la suite, le français est graduellement introduit au fil des années en faveur du français pour constituer 90 % des activités pédagogiques à la cinquième année, contre 10 % pour la langue nationale. De deux classes mooré-français en 1994, l'éducation bilingue, aujourd'hui, compte 41 écoles bilingues expérimentées dans sept langues nationales et le français dans 10 des 13 régions du Burkina. Finalement, les lois linguistiques sont quasi inexistantes dans ce pays, à l'exception de l'arrêté no 131 du 3 octobre 1991 portant organisation de la Direction générale de l'Institut national d'alphabétisation. Le plus curieux, c'est que l'Arrêté ne mentionne aucune langue en particulier, si ce n'est de la «langue française» et des «langues nationales» en général. 4.3 Médias et vie économique Dans la vie économique, le français occupe une place presque exclusive, notamment à l'écrit. L'anglais suit de très loin. Cependant, les communications informelles orales se déroulent souvent en mossi ou en dioula, parfois en peul. Dans les médias, le décret no 95-306/PRES/PM/MCC portant cahier des missions et charges des radiodiffusions sonores et télévisuelles privées au Burkina Faso prévoit que toute station de radiodiffusion sonore ou télévisuelle devra, à travers ses programmes, contribuer à la promotion de la culture et des langues nationales:
Les émissions radiophoniques sont produites en français et dans une dizaine de langues nationales. Les différentes stations de radios, tant publiques que privées, ont aménagé des plages horaires consacrées aux informations en langues nationales dans leur programme; les journalistes ont droit à une quinzaine de minutes pour présenter leur «journal parlé» aux locuteurs de la langue locale qu’ils utilisent (dioula, mooré, foulfouldé, etc.). Étant donné que la population ne sait pas lire, les politiciens jettent leur dévolu sur la radio qui couvre tout le territoire national, contrairement à la télévision qui n'atteint que quelques villes du pays. Par exemple, lors des campagnes électorales, les militants de différents partis livrent leurs messages en français aux auditeurs tout en laissant aux journalistes et aux «crieurs publics» (individus sans formation désignés pour jouer les interprètes) le soin de traduire et de commenter à la population les propos en langues nationales. Malheureusement, la plupart des informations données dans les langues nationales sont très souvent tronquées, car les journalistes ne reçoivent aucune formation particulière. Leur recrutement se fait «sur le tas», alors que la véritable qualification c'est de parler une langue nationale. Les journalistes qui communiquent en français sont considérés comme des professionnels, tandis que les journalistes en langues nationales sont perçus comme étant de «seconde zone». La Télévision nationale du Burkina diffuse massivement en français et dans six langues nationales (mooré, dioula, fulfuldé, bissa, dagora, gulmacema) des bulletins d'information. La presse écrite, dont six quotidiens et plusieurs hebdomadaires, ne paraît qu'en français. En somme, on pourrait citer Louis-Jean Calvet à propos du français en Afrique dans Linguistique et colonialisme:
Le Burkina pratique une politique de non-intervention en ce qui a trait au français et une politique très sectorielle pour les langues nationales. Il faut dire que l'État a toujours été plus préoccupé à consolider le pouvoir en place que de gérer des langues qui, dans les faits, ne causent apparemment pas de problème de société. En ce sens, le Burkina a simplement poursuivi la politique coloniale. En Afrique, ce genre de politique est de plus en plus appelé à changer pour laisser davantage de place aux langues nationales. Beaucoup de Burkinabés pensent que l'État devrait accorder plus d'importance à ces langues, mais la connaissance du français est devenue une obligation d'ordre économique. Le pays n'a pas encore réussi à harmoniser ses politiques linguistiques. |